Même plus d’inspiration pour un titre moisi. Tout se perd…

Ah, cruelle désillusion !

Persuadée que la règle du multivers concernant les singes s’appliquerait ici, je m’en étais allée, la fleur aux lèvres et la bave au fusil, gambader dans un multiplex devant « La Planète des Singes : les Origines », en vertu de ce fameux principe selon lequel le second animal le plus cool de la création, après le chat, est le singe.

Trois fois hélas, ce ne fut pas foncièrement cool.
En prime, « La Planète des Singes » m’a obligé à revoir mes perspectives d’avenir à la baisse.


Un abruti de stagiaire a écrit « James Franco » en haut de l’affiche. Pour mémoire, le singe, c’est Andy Serkis…

Avant ce film, j’avais de grandes ambitions pour moi. Je pensais que je pourrais donner mon corps à la science et faire ainsi progresser la recherche, mais las, voilà que je découvre que, totalement incapable de terminer le jeu de la tour de Hanoi, je ne pourrai jamais devenir singe de laboratoire.
C’est vraiment trop bête, mais passons sur mes tourments personnels, quand bien même depuis je ne cesse de me morfondre sur fond d’automne triste.

Car « La Planète des Singes : Les Origines » s’il ne s’agit toujours pas d’un mauvais film (pas réussi à en voir un seul depuis «Transformers 3 » c’est fou çà), entre direct au panthéon des blockbusters qui font pschiiiiiittttt. La faute tout ensemble à une réalisation qui peine à rester à la hauteur de son sujet, d’un scénario très mal équilibré et d’un montage qui m’a laissée souvent sans voix.

A l’origine, il y avait pourtant une bien belle ambition, celle d’opérer un reboot complet d’une franchise mythique sentant aujourd’hui bon la colle, les poils synthétiques et les armes en vente libre.


Indeed…

Le résultat est au final assez affligeant de banalité, oscillant lourdement entre le récit mythologique et une compilation stérile d’anecdotes.

Le principe de départ entre pourtant en résonnance avec notre monde post 11 septembre, faisant disparaitre la menace atomique, d’actualité dans la version d’origine, au profit de celle plus pernicieuse du virus, en bref l’ennemi invisible, le grand classique depuis 2001 (et j’écris ceci en partie à l’intention de quelque uns de nos éminents critiques français qui voient dans tout immeuble, maison, château de carte, arbre, pyramide de pièces qui tombe une allusion au 11 septembre. Mauvaise pioche, les gars…).
Sur cette base, le film se contentera pourtant d’enfiler des rebondissements capillotractés comme autant de deus ex machina n’aboutissant jamais à créer un climat de tension ou de fin du monde pour l’espèce humaine.
On découvrira plutôt l’histoire totalement aberrante de Franklin l’assistant de labo qui se fait contaminer par accident par un virus plus mortel que Ebola mais qui au lieu d’aller voir son médecin ou son collègue qui a créé le virus, préfère aller cracher sur les gens dans la rue.

Arc narratif prodigieux nous conduisant tout droit vers une conclusion développée dans le générique de fin. Non, vous ne rêvez pas.
La fin programmée de notre espèce renvoyée à une petite scène post première partie de générique, comme si elle n’était qu’anecdotique, et bouclée par une animation sur laquelle défileront les noms des membres de l’équipe technique.


Et donc le nom de l’acteur principal, Andy Serkis, ici au centre, en dernier.

Ouais ouais…

Autre gros défaut de « La Planète des Singes », outre celui de faire passer l’apocalypse pour une réunion Tupperware, son montage.
Réussir une introduction plus laborieuse que « Colombiana » et « Sucker Punch » réunis, il fallait tout de même le faire.
Admirez le travail : 6 séquences introductives contenant deux montages le tout sur une durée d’environ 20 minutes.


Et toujours ce jeu tout en sourcils chez James Franco : continue à nous faire rêver !

Après les singes capturés dans la forêt, la guenon dans le labo qui empile des rondelles de métal, puis la même guenon qui vire berserk parce qu’elle vient d’accoucher SANS QUE PERSONNE NE SE SOIT RENDU COMPTE QU’ELLE AVAIT UN POLICHINELLE DANS LE TIROIR ALORS QU’ELLE EST TOUT DE MÊME DANS UN LABO ENTOUREE H24 PAR DES SCIENTIFIQUES. JE SAIS PAS VOUS MAIS MOI CA ME DONNE ENVIE D’ECRIRE EN MAJUSCULES…
Ahem… Et puis James Franco qui adopte un singe (ou l’inverse, je sais pas trop) et son papa qui a Alzheimer (drama !) et le bébé singe qui devient un enfant singe choupi (mooooontage !!!) et puis James Franco draguant une vétérinaire avec ses sourcils, et retournons un peu vers son papa à qui il injecte un traitement en loucedé afin qu’il puisse de nouveau jouer du piano comme si c’était de l’essence d’Hélène Grimaud dans la seringue et puis bam, quand tu n’y crois plus, boum, MONTAGE !!! et…

Ayé, le film peut commencer…

Et s’étirer à n’en plus finir dans des séquences plus WTF tu meurs à base de César est plus intelligent que les autres singes, César se fait taper par le caïd de la fourrière, César se fait un pote orang outan qui cause en langage des signes, César se fait bizuter par Drago Malefoy (et oui…).

[ Intermède : La vétérinaire qui ne servait çà rien, le retour.

Vous vous rappelez de « Battle Los Angeles », ce film prodigieux et surtout de cette scène mémorable où les Marines décidaient d’ouvrir un extraterrestre pour voir comment c’est fait à l’intérieur ces trucs là et que le personnage de la civile se ramène en disant : « Je peux vous aider. Je suis exobiologiste vétérinaire. » ?
Bon ben, la même. James Franco va faire réparer son singe dans un zoo chez une vétérinaire qui s’y connait en babouins. Par chance, la vétérinaire est jouée Freida Pinto, est donc fort jolie mais malheureusement aussi fort débile.

Grâce à un montage idiot, on découvrira plus tard que la vétérinaire fréquentera James Franco et son singe pendant cinq ans. Et cinq années durant, jamais elle ne s’étonnera du fait que César est bipède, mesure genre un bon mètre quatre-vingt, joue super bien au majong, et parle couramment le langage des signes. Non, il faudra un long monologue de James Franco (destiné à César, en plus) pour que cette ouiche lorraine fasse tilt….

Ouiche qui ne servira absolument plus à rien par la suite, est-ce bien la peine de le préciser…

Fin de l’intermède. ]

L’intérêt est somme toute assez limité si l’on s’en tient strictement au scénario, se contentant de placer deux trois éléments en s’imaginant que c’est une bonne idée avant de se rendre compte qu’il est dans l’impasse. Et hop, une petite facilité, une petite incohérence, et ça repart…

Et si la réalisation ne sauve strictement rien, il faut tout de même reconnaitre au film sa principale réussite, celle consistant à faire totalement adhérer au parti des singes.

Seule la trajectoire de César compte, seul son point de vue s’imposera peu à peu, jusqu’à opérer une totale inversion des rôles.
Si l’on se souvient de l’original, les singes étaient la menace, l’ennemi à combattre. Ici, le virus seul se charge d’incarner le vrai péril (du reste fort tard), les singes devenant les vrais héros et leur liberté le vrai enjeu.
Une incontestable réussite qui n’est pas sans rappeler celle d’ « Avatar » dans le même registre.

Ceci dit (attention jeu de mot absolument pas prévisible depuis le début de ce billet en approche), il faut rendre à César ce qui lui appartient et reconnaitre qu’il était plus risqué de faire adhérer le public au destin tumultueux d’un gros chimpanzé qu’à celui d’une bande de bimbasses bleues en string.

Or le défi est relevé haut la main, en grand partie grâce au travail exceptionnel d’Andy Serkis sur son personnage (dans le deuxième rôle de singe de sa carrière), abolissant toute humanité pour composer un César intense et crédible, débordant de charisme.

Une performance rehaussée par la qualité de réalisation du personnage, dont le photoréalisme, encore perfectible, atteint un degré parfois troublant.
Mérite revenant à Weta Digital, qui après « Avatar » et « The Tree of Life »s’avère définitivement une longueur devant tous les autres en matière de CGI. Une suprémacie dont il est difficile de douter devant un plan pareil.

Foncièrement dérangeant, César, venu tout droit de l’uncanny valley, est très rapidement la seule bonne raison de rester devant ce film mal équilibré où l’intelligence des singes varie selon les besoins du scénario, mais qui contient tout de même une des scènes les plus grisantes et les moins justifiables de l’année. Une scène dont je ne parlerai pas ici pour ne pas vous spoiler (voyez comme je vous aime…), d’autant qu’elle offre le seul instant de vraie tension dramatique.

Oui, dans un film où il est question d’émergence de la nouvelle espèce dominante et de future extinction de l’humanité.
Enième « Origine », « La Planète des Singes » ne me fera pas me relever la nuit. Malgré l’indéniable prouesse technique autour de César (Andy Serkis, dernier nom au générique, ce scandale…) et un traitement honnête, l’ensemble s’apparente davantage à un gentil film du dimanche soir.
Et n’enterre en aucun cas le film de Tim Burton, qui certes n’est pas son meilleur, mais appartenait à un homme qui en ces temps aujourd’hui disparus, connaissait son métier et savait injecter le meilleur de ses névroses dans de grandes œuvres torturées.
C’est toujours les meilleurs qui s’en vont en premier…


Je prédis donc une longue carrière à James Franco.

Note : *

PS : Je ne vous dis même pas comment j’ai trop hâte à « Conan »… Sans Milius, sans Arnold…. Sans Pouledoris……… Monde de merde.

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