I can see forever

Ahem.

Eheh…

Ouais, vous ne rêvez pas. Un article. Un foutu billet sur ce blog, OMGWTF maykesepasset’il ?

Premièrement des excuses, plates : je n’ai pas assuré cet été mais alors là pas du tout. La faute aux Hollandais, aux repos/congés passés à faire d’autres trucs qu’aller au ciné / écrire des billets.
M’en voulez pas, c’est IRL. IRL is a bitch. It is known.

Ma contrition n’ayant d’égale que mon sens aigu du foutage de gueule, ma proverbiale générosité me pousse donc à vous balancer, après UN MOIS passé à ne rien publier (mois que je n’ai MEME pas employé à aller voir « Les Gardiens de la Galaxie », ni « The Expendables 3 » OUVALEMONDE ???), je me dis « ils sont tous en train d’espérer « La Planète des Singes Keri Russell Edition », donc je vais balancer « Lucy ».

Logique.

Ligne éditoriale de qualitay.

Vous qui venez ici souvent savez mon amour inconditionnel pour Luc Besson, son cinéma et ses truculentes prises de position sur le téléchargement.

Ainsi, me croiser dans une salle projetant « Lucy » relèverait presque de la réalité alternative sauf que, dans la réalité vraie de notre vérité du présent toussa, j’aime autant Scarlett Johansson que je déteste Luc Besson. Tiraillée entre deux pôles, j’ai décidé de trancher le nœud gordien (vous aurez noté l’usage mal à propos du nœud gordien, j’espère) déclarant un beau matin « RANAFOUT de Besson, j’irai pour toi, ma Scarlett ! »

Et je m’en fus voir Mamzelle Scarlett trainer une moue de circonstance durant approximativement 1h30 de film surprenante.

En quoi « Lucy » est-il surprenant ? Premièrement, le film n’est pas mauvais. Attention, pas bon non plus. Mais Luc Besson y fait souvent preuve de bon goût. Lorsqu’il n’use ni n’abuse de son humour potache habituel, épargnant à ses personnages blagounettes et autres punchlines placées à la va que je te pousse. Bon goût aussi quand, contre toute attente, avec une matière première atomique à disposition, il ne joue JAMAIS de la plastique de son actrice principale.
On aura connu Luc bien plus racoleur. Ici, il se montre juste malin, en détachant le regard du spectateur de la sculpturale Scarlett pour la circonscrire à son statut d’être humain. Filmée sans complaisance, Lucy est un personnage défini par son humanité, et l’absence de sexualisation renforce le propos du film, supposé célébrer la puissance de l’intellect et l’infini potentiel du genre humain.

« Supposé » : mot clé dans la phrase ci-dessus car si Luc Besson a de belles ambitions et qu’il fait des efforts manifestes pour toucher à son but ultime, « Lucy » reste un projet sans intérêt majeur, la faute à un manque évident de profondeur. Avec un concept fort, celui de l’élévation de l’homme vers le divin, Besson atteint très vite ses limites. S’il maîtrise le rythme de son film sans jamais laisser de temps mort, s’il tient son high concept de bout en bout, il se montre incapable de faire décoller son propos. « Lucy » est un film creux, presque vide, malgré la richesse de son sujet.
Pour s’en convaincre, il suffit de regarder l’interminablement chiant dialogue d’ouverture où Pilou tente de convaincre Scarlett d’aller porter une mallette dans un hôtel mais elle veut pas aller mayrde quoi non s’il te plait toujours pas *stockshot d’une reconstitution de Lucy, l’australopithèque, pourquoi ? nul ne le sait* maaaaaiiiis eeeeuuuh !!!! nopenopenope je t’en prie, nononononon STOOOOOOOP => deux minutes de film et je suis déjà à ça de quitter la salle pour cause de première scène mal écrite et réalisée avec les pieds. La suite me donnera tort, Besson réussissant à certes toujours mal écrire son film, mais à l’emballer convenablement. Si on accepte de ne pas se pencher plus de 2 secondes sur les ressorts de l’intrigue et les facilités WTFesques qui permettent à l’histoire d’avancer.
Soyons indulgents, c’est l’été.

Dans le dernier acte, je me suis tout de même surprise à penser « c’est la fin du film, mais j’ai l’impression que ça n’a jamais commencé« . Très peu de tension, malgré un premier quart anxiogène à base d’enlèvement, de Coréens, de chirurgie abdominale non consentie, ne construisent jamais un rapport d’empathie avec le personnage principal qui bascule assez vite en mode Sherlock, robot sans émotions qui se fend malgré tout d’une séquence émotion assez bien pensée, où Lucy raconte à sa mère l’ensemble de ses souvenirs, comme un essai de définition de l’humain.
Malheureusement, le but recherché n’est pas vraiment atteint.

Luc Besson se bride finalement lui-même en faisant de la Lucy dopée un être froid de pure raison, excluant toute animalité comme si la somme des émotions, instincts et sensations était exclusive de la quête de divinité.
L’idée n’est pas stupide en soi, permettant par exemple une confrontation entre Lucy Scarlett et Lucy australopithèque, la première jouant le rôle du monolithe dans une scène de bouclage de boucle élégante, au sein d’un montage cosmogonique réussi.
Simplement, l’ancrage émotionnel étant inexistant, bien que la séquence soit belle et bien pensée, on ne peut la regarder qu’avec détachement. Besson s’inspire de toute évidence des fulgurances d’un Terrence Malick qui dans « The Tree » of Life » liait le macro au microcosmos en résumant l’histoire de l’univers au cheminement émotionnel de ses personnages principaux. Or dans « Lucy », c’est précisément cette émotion, cette viscéralité, cette empathie qui manque et fait du film un spectacle bien mené mais sans intérêt véritable.

Car malgré les qualités du film, à la mécanique impeccablement huilée, « Lucy » reste une œuvre de Luc Besson, avec tout ce que cela implique en terme de limitations.
Incapable de faire passer par sa mise en scène les angoisses de son héroïne quand elle se trouve au début du film ravalée au rang de proie, Besson te balance, pépère, des stock shots dans la face à base d’animaux de la savane. Allégorie, gros demeuré de spectateur, Lucy ça être l’antilope, les Coréens ça être le guépard.

Tu m’as prise pour Orson Lannister ???

Incapable de créer l’angoisse nécessaire à sa scène, Besson se croit malin en incluant à son montage ces images, pensant créer un parallèle intelligent. Sauf que c’est mon intelligence à moi qui s’est sentie insultée. Sans l’image du guépard qui bouffe la gazelle JAMAY je n’auray compris que Lucy étay en dangay !!!! OMG !


Mais avant tout, Lucy était vraiment très distinguée.

Plus puissant encore, il arrive même à détruire une idée de montage pas dégueu en employant le même procédé. Le personnage de Morgan Freeman donne un cours à la Sorbonne sur le potentiel du cerveau humain. Une séquence qui aurait pu être passée en une fois mais ça aurait été chiant, il va donc la fractionner et l’inclure de temps à autre entre deux péripéties de Lucy. Jusque là, rien à dire, même si bon, le principe du personnage qui t’explique le concept par le menu, c’est parfois laborieux. Je ne peux que saluer la pirouette permettant d’alléger cette exposition.
Là où je m’enfonce les doigts dans les yeux jusqu’au coude, c’est quand Besson croit bon d’illustrer les propos de Freeman avec D’AUTRES STOCK SHOTS : c’est quoi ton problème, mec ?
Attention, séquence d’anthologie :
Morgan Freeman : « Parfois, les cellules choisissent la reproduction. »

  • montage montrant watmille animaux qui baysent*

J’avais BESOIN de voir deux lions en train de butt sex pour piger le concept de reproduction ? VRAIMENT ?

C’est précisément là que l’on atteint les limites d’un réalisateur qui ne manque pas forcément de savoir faire, mais de génie pour transcender son propos par sa mise en scène. La narration en devient terne et sans saveur, même si très fluide et appréciable. Aucune digression n’est à déplorer, tout se joue sur le film d’une unité de temps serrée qui a le mérite d’appuyer l’un des concept du film. Et l’on sent la volonté manifeste de Besson de corréler le fond à la forme. Malheureusement, son fond ne repose que sur son argument. Le film n’a donc que deux dimensions, celle de son concept et celle de sa mise en image, sans atteindre jamais la troisième, la dimension introspective et donc métaphysique, qui était pourtant en germe dans le projet.

Mis à part ses qualités mécaniques et son manque singulier de profondeur, « Lucy » contient un incroyable morceau de bravoure. Un colossal pied de nez à la face du public. Limite si tout le film n’est pas un gigantesque troll.
« Lucy » fait en effet l’apologie du partage de données.

Je vous la refais : dans son dernier film, Luc Besson fait l’apologie du partage de données.

De la part du mec qui vomit l’idée même que ses films puissent s’échanger librement sur la Toile en vertu de son incapacité à penser un autre système favorisant la diffusion massive des œuvres tout en valorisant financièrement son travail, j’ai trouvé « Lucy » à mourir de rire.
Ce qui a un peu achevé de me convaincre que Luc Besson est plein de bonnes intentions, mais bon, en fait, il n’a pas trop trop réfléchi à ce qu’il écrivait. Parce que l’exercice s’apparente quand même à Cécile Duflot qui ferait l’apologie du nucléaire. Pour vous situer le niveau de la contradiction…

Note : *

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